Cameroun : Recrudescence des attaques de Boko Haram dans l'extrême nord

En Bref

La région de l’Extrême-nord du Cameroun est récemment devenue le théâtre d’une recrudescence d’attaques perpétrées par le groupe terroriste nigérian Boko Haram. Ces incursions, qui continuent à sévir dans la région, ciblent les villages, les centres de santé et les positions des forces armées camerounaises pour se ravitailler en nourriture, en bétail, en médicaments et en armes. Enlèvements, attentats-suicides à répétition et attaques à l’arme lourde sont ainsi devenus le quotidien des populations locales.

Depuis le mois de mai, la région a enregistré plus d’une vingtaine d’attaques, principalement dans les localités camerounaises limitrophes aux fiefs de Boko Haram au Nigéria. La recrudescence de ces attaques prouve que malgré les lourds moyens militaires investis, la menace terroriste dans la région est toujours présente, et que la secte islamiste garde une importante capacité de nuisance.

Mais comment expliquer ce regain d’activité du groupe djihadiste dans la région ?

Point de situation 

Depuis mars 2014, l’Extrême Nord du Cameroun est ravagé par des violences attribuées à Boko Haram. Face à la répression menée par les forces armées nigériane en 2009, ce groupe terroriste, qui dès 2003 a utilisé le territoire camerounais comme zone de repli et de repos, a progressivement changé de stratégie en utilisant les villages proches de la frontière nigériane comme espace d’approvisionnement. S’en sont suivi de violentes attaques, accompagnées la plupart du temps de raids meurtriers, de kidnappings, d’incendies criminels et d’assassinats ciblés, suivis de messages de menaces à destination des populations.

Celles-ci, face à la récurrence de ces attaques tentent de fuir ce qui crée un déplacement massif des populations. En effet, malgré la présence des forces armées camerounaises dans la région, les populations de l’Extrême-Nord ressentent de plus en plus la présence du mouvement terroriste. Ces dernières semaines, plusieurs centaines de familles vivant dans les villages situés à proximité de la frontière avec le Nigeria (Zeleved, Amchidé, Kouyapé, Zigague, Tourou) ont été contraintes de quitter leurs habitations en raison de la multiplication des violences imputées à Boko Haram.

L’atmosphère d’instabilité permanente dans l’Extrême-Nord a conduit le gouvernement camerounais à revoir sa stratégie militaire. Le président Paul Biya a réorganisé son état-major et déployé des milliers de soldats dans la région. La coopération entre les armées des différents pays a également été renforcée, notamment avec la création de la Force Multinationale Mixte (FMM) de lutte contre Boko Haram en 2015. Composée de plus de 10 000 hommes issus des pays riverains du lac Tchad, cette force a mené des offensives qui ont infligé des pertes considérables aux terroristes. Plusieurs caches d’armes ont été découvertes et les arrestations de membres se font de plus en plus nombreuses.

Pourtant, après une période d’accalmie, les attaques de Boko Haram ont repris dans la région du Lac Tchad et dans l’Extrême-Nord du Cameroun. La secte terroriste, dont les capacités militaires avaient été largement affaiblies du fait des saisies d’armes et de l’arrestation de certains de ses logisticiens, intensifie aujourd’hui les attaques et met la région sous pression.

Plusieurs raisons peuvent expliquer ce regain de violences : d’abord, malgré les offensives menées à leur encontre sur le sol camerounais, les forces de Boko Haram n’ont jamais réellement déserté le pays. Elles se réfugient dans des zones dont l’accès est difficile pour les troupes (ex : monts Mandara) et parviennent encore à prendre de court militaires et civils dans la région du lac Tchad, prouvant que le groupe garde une importante capacité de nuisance. Les offensives militaires menées par les armées nigérianes et tchadiennes corrélées au verrouillage des circuits d’approvisionnement augmentent également ces violences car elles poussent les assaillants à se ravitailler du côté camerounais.

La destruction des capacités matérielles de Boko Haram ne suffit pas à mettre un terme à l’offensive djihadiste. De plus grandes violences sont à anticiper dans la région car les djihadistes ont pour objectif probable de s’installer dans le Logone et Chari, une zone de confins riche en ressources naturelles, en armes et en hommes disponibles (présence d’anciens rebelles tchadiens).


 

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